SELARL ou SELAS : Quelle Forme Juridique choisir ?

Si vous avez suivi notre dossier BNC ou SELARL pour votre activité libérale, il se peut que vous ayez décidé de créer votre Société d’Exercice Libéral. Vient alors un choix important sur la forme juridique de votre entreprise. Deux options s’offrent à vous :

  • La SELARL, Société d’Exercice Libéral à Responsabilité Limitée, inspirée de la SARL
  • La SELAS, Société d’Exercice Libéral par Actions Simplifiée, inspirée de la SAS

Alors, SELARL ou SELAS ? Avant toute chose, sachez que le fonctionnement de ces deux sociétés est identique sur de nombreux aspects. C’est notamment le cas pour :

  • Les conditions d’entrée au capital pour les associés de la société
  • Les modalités et les coûts de création
  • La responsabilité des associés
  • Les modalités d’imposition de la société
  • Les règles relatives à la comptabilité

Je n’entrerai pas dans le détail de ces points, puisqu’ils ne seront pas déterminants pour votre choix. Il existe cependant plusieurs éléments différenciants, dont certains emportent des conséquences à long terme en matière de gestion et de fiscalité. Je me focaliserai sur ces points en faisant une étude comparative pour vous aiguiller entre SELARL ou SELAS .

Au préalable, sachez qu’il est toujours possible de basculer d’un statut à l’autre et modifiant la forme sociale de votre SEL. Toutefois, ce changement est lourd de conséquences et requiert un accompagnement spécialisé. Autant partir du bon pied!

Le nombre d’associés

De même que pour les SARL et les SAS, SELARL ou SELAS peuvent être créées par un associé unique qui détient l’ensemble du capital. Contrairement aux croyances, la pluralité d’associés n’est donc pas un prérequis. D’ailleurs, de nombreuses sociétés d’exercice libéral ne possèdent qu’un seul associé.

Le nombre maximum d’associés est en revanche limité à 100 en SELARL, illimité en SELAS. Cette limite de la SELARL ne devrait pas poser de problème pour un cabinet libéral de taille normale.

La personnalisation des statuts

À la création de votre société d’exercice libéral, la rédaction des statuts constitue une étape importante. Vous pouvez souhaitez personnaliser ces statuts pour bâtir un fonctionnement à votre image.

Les statuts d’une SELARL sont assez encadrés et comportent un certain nombre de mentions obligatoires. Vous pouvez bien entendu personnaliser les modalités classiques de fonctionnement de la société (ex: modalités de convocation et tenue des assemblées). En revanche, vous ne pouvez pas déroger aux grands principes qui caractérisent les sociétés à responsabilité limitée (par exemple l’unicité du rôle de gérant, seul organe de direction).

La SELAS offre une plus grande liberté de rédaction des statuts : vous avez davantage de latitude pour personnaliser le fonctionnement de la société, notamment sur le plan juridique. Vous pouvez ainsi:

  • Définir des actions de préférence, pour faire en sorte que certains associés (par exemple les fondateurs) aient des droits supplémentaires
  • Définir plusieurs organes de gouvernance (voir ci-dessous)
  • Organiser de manière spécifique les opérations sur les titres de la société
Votre souhait de personnaliser le fonctionnement de la société à travers les statuts peut orienter votre choix entre SELARL ou SELAS
En SELAS, vous avez davantage de liberté dans la personnalisation de vos statuts

Si vous créez une société avec plusieurs associés, et que vous jugez nécessaire de segmenter les droits et les rôles de chacun, alors ce point sera déterminant et vous opterez logiquement pour la SELAS. Si en revanche vous travaillez avec un nombre raisonnable d’associés (ou si vous êtes le seul associé), que votre intention est de préserver un mode de fonctionnement simple de la société, alors cette liberté de rédaction des statuts ne devrait pas aiguiller votre choix.

En effet, en SELARL ou SELAS, les éléments essentiels des statuts seront forcément précisés (répartition du capital, modalités de convocation et tenue des assemblées, etc..), et vous tâcherez d’éviter de monter des usines à gaz qui risquent de complexifier votre gestion quotidienne.

L’organisation de la gouvernance

Déclinaison de la liberté de rédaction des statuts mentionnée ci-dessus, l’organisation de la gouvernance peut être très différente entre SELARL ou SELAS.

En SELARL, le dirigeant s’appelle le gérant. Il est nommé par les associés au cours d’une assemblée générale – ou directement dans les statuts – dès la création de la société. Il est de pratique courante que le gérant soit lui-même un associé.

Les pouvoirs du gérant de SELARL sont précisés dans les statuts. Selon le niveau de confiance accordé au gérant, celui-ci peut avoir tous les pouvoirs (c’est à dire la capacité à prendre toutes les décisions qu’il juge opportun au nom de la société), soit des pouvoirs limités (la capacité de prendre des décisions jusqu’à un certain niveau d’engagement au-delà duquel l’approbation des associés devient nécessaire).

Il est possible d’avoir plusieurs gérants dans une SELARL. Comme le rôle de gérant est défini de manière unique, tous les gérants auront exactement les mêmes pouvoirs.

En SELAS, le dirigeant s’appelle le président. C’est lui qui représente la société vis-à-vis des tiers et l’engage par sa signature. Il a les pouvoirs les plus étendus, mais ceux-ci peuvent toutefois être limités par des dispositions statutaires.

La liberté de rédaction des statuts de SELAS permet également de créer plusieurs organes de gouvernance et de contrôle avec des rôles différents. Ceci est particulièrement utile si la société possède plusieurs associés qui n’ont pas la même implication dans sa gestion et dont on veut personnaliser les rôles: Direction générale, Comité de direction, Conseil d’administration, Conseil de surveillance, etc…

En clair, si vous voulez créer plusieurs organes de gouvernance, seule la SELAS pourra répondre à votre besoin.

Votre choix entre SELARL ou SELAS dépend également de la configuration que vous souhaitez en matière de gouvernance de la société
Lorsque votre société regroupe plusieurs associés avec des implications différentes, la SELAS permet de personnaliser le rôle de chacun

SELARL ou SELAS : Le statut social du dirigeant

Le statut social du dirigeant est souvent cité comme le point clé qui oriente le choix de la forme juridique de votre société. Ceci est vrai pour une société commerciale traditionnelle (SARL ou SAS), mais l’est beaucoup moins pour une société d’exercice libéral (SELARL ou SELAS). Voyons pourquoi.

Au préalable, il est important de rappeler que lorsque vous exercez votre profession libérale en société, vous possédez deux rôles différents, pour lesquels vous pouvez percevoir deux rémunérations distinctes :

  • Une fonction « technique », pour l’exercice libéral de votre activité professionnelle
  • Une fonction de mandataire social, si vous êtes également gérant ou président de la société

Au titre de votre fonction technique, vous aurez toujours le statut social de travailleur non salarié (TNS). Vos cotisations sociales sont toujours assises sur les taux applicables aux professions libérales, selon qu’elles soient réglementées ou non.

Si vous possédez également un mandat social, et que vous êtes rémunéré à ce titre, il est possible que vous ayez également un deuxième statut au titre de fonction de dirigeant, selon la forme juridique et le nombre de parts sociales que vous détenez.

Ainsi, si vous êtes président en SELAS ou gérant minoritaire en SELARL, et que vous êtes rémunéré au titre de votre mandat social de dirigeant, vous serez alors, en plus du régime des TNS, affilié au régime général de la sécurité sociale. Vous aurez donc une double affiliation (bonjour la simplicité). Voici un tableau qui résume la situation  :

Statut social du professionnel libéralSELARLSELAS
Régime TNS uniquementGérant majoritaire (>50% des parts)
Associé non gérant
Associé non dirigeant
Double affiliation :
Régime TNS + Régime général de la sécurité sociale
Gérant minoritaire ou égalitaire (<=50% des parts) Président
Directeur général

Concrètement, qu’est-ce que ça change ? Finalement pas grand chose.

A priori, la majeure partie de vos rémunérations seront attribuées pour l’exercice de votre activité professionnelle traditionnelle. A ce titre, le taux de cotisations demeure inchangé (régime des TNS) quelque soit la forme juridique, SELARL ou SELAS.

D’ailleurs, il faut également savoir que si vous ne percevez pas de rémunération au titre de votre fonction de mandataire social, vous n’êtes pas tenu de vous affilier au régime général, et n’avez donc aucune cotisation à verser. Dans la pratique, c’est ce que je recommande pour vous éviter de dépendre de deux régimes sociaux différents, une situation complexe et sans grand intérêt.

Si, pour une raison particulière, votre rémunération de dirigeant devient significative, alors l’impact financier ne doit pas être négligé. Les cotisations sociales du régime général sont en effet près de deux fois plus élevées. Et contrairement aux croyances, la protection sociale que cela procure n’est guère mieux lotie que celle des travailleurs non salariés. Dans ce cas, mieux vaut exercer en SELARL pour réduire la facture.

La rémunération du mandat social de dirigeant peut donner lieu à une double affiliation en matière de régime social : un vrai casse-tête!

Le régime d’imposition de la société et des rémunérations

Au niveau du régime d’imposition, les SELARL ou SELAS sont par défaut soumises à l’impôt sur les sociétés et peuvent, sur option, choisir le régime de l’impôt sur le revenu. Pas de différence sur ce point. Une seule subtilité : si la SELARL est créée par un associé unique, c’est le régime de l’impôt sur le revenu qui est applicable par défaut, avec option pour le régime de l’impôt sur les sociétés.

Dans tous les cas, vous prendrez bien soin d’opter pour le régime de l’impôt sur les sociétés, qui procure tout l’intérêt de la société d’exercice libéral. En effet, si vous optez pour le régime des sociétés de personnes, cela revient quasiment à la même chose que d’exercer en BNC, autant ne pas s’embêter à créer une société d’exercice libéral!

Sur le plan fiscal personnel, les rémunérations perçues par les associés de sociétés d’exercice libéral seront en SELARL ou SELAS taxées de la même manière:

  • Si la SEL est soumise à l’impôt sur les sociétés, dans la catégorie des traitements et salaires, après déduction des frais professionnels (abattement de 10% plafonné ou frais réels) et des cotisations sociales obligatoires et facultatives (Madelin).
  • Si la SEL est soumise à l’impôt sur le revenu, c’est le régime des BNC qui s’applique, le professionnel sera tenu de déclarer sa quote-part des bénéfices de la société dans sa déclaration annuelle de revenus, après déduction des cotisations sociales obligatoires et facultatives (Madelin).

SELARL ou SELAS : La fiscalité des dividendes

Les dividendes versés aux associés de la société subissent  une différence de traitement significative en matière de cotisations sociales.

Sur le plan purement fiscal, l’imposition des dividendes est la même en SELARL qu’en SELAS. Les dividendes sont taxés au taux unique de 12,8%. Vous pouvez également décider, sur option, d’être soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu après un abattement de 40%. Au passage, cette option au barème n’a d’intérêt que si votre tranche marginale d’imposition est faible (<30%).

Sur le plan social, en tant que revenus du capital, les dividendes sont par défaut soumis aux prélèvements sociaux de 17,2%. Toutefois, en SELARL, au delà de la limite de 10% des apports actionnaire (capital social + primes d’émission + comptes courants d’associé) les dividendes sont à la place soumis aux cotisations sociales (environ 30%), comme s’il s’agissait d’une rémunération.

Ci-dessous un tableau récapitulatif pour mieux comprendre :

SELARL : Dividendes < 10% apports actionnaireSELARL : Dividendes > 10% apports actionnaireSELAS
Contributions socialesPrélèvement sociaux forfaitaires (17,2%)Cotisations sociales (URSSAF+Caisse de retraite)Prélèvement sociaux forfaitaires (17,2%)
Impôt sur le revenu12,8% ou barème progressif après abattement de 40%
Comparaison de la fiscalité des dividendes entre SELARL ou SELAS

Ainsi, dès lors que le dirigeant souhaite se verser régulièrement des dividendes, l’avantage penche en faveur de la SELAS. Pourtant, il y a deux éléments qu’il faut également prendre en compte pour apprécier cette problématique dans sa globalité :

  • En SELARL ou SELAS, il est possible de s’affranchir de cette fiscalité sur les dividendes en mettant en place une holding (SPFPL notamment) qui détient la SEL. En effet, en tant que personne morale, la fiscalité applicable à la holding est très différente : les remontées de dividendes bénéficient du régime mère-fille et sont taxés dans la holding à un taux proche de… 1%. Ce n’est pas le seul intérêt de la holding, voir notre dossier spécial sur ce point.
  • Les dividendes sont fiscalement considérés comme des revenus du capital, et non comme des revenus du travail. Ainsi, les dividendes ne génèrent aucun droit social, en termes d’assurance maladie ou de retraite. Il faut également rappeler que les dividendes ont déjà été imposés à l’impôt sur les sociétés en amont. Sauf cas particulier, je déconseille la stratégie qui consiste à se rémunérer en dividendes.

Du coup, en tenant compte de ces deux remarques, l’avantage de la SELAS est beaucoup moins net. En effet, quelque soit la fiscalité des dividendes, vous avez de base plus intérêt à vous verser une rémunération, dont les cotisations sociales seront non seulement déductibles du résultat fiscal, mais qui de surcroît vous généreront des droits sociaux.

Si vous exercez en SELARL et qu’un versement de dividendes est une option inévitable pour différentes raisons (par exemple un associé non professionnel qui réclame des dividendes au titre de son investissement dans la société), alors vous prendrez soin de créer une holding SPFPL au préalable pour limiter l’impact social et fiscal.

La fiscalité des dividendes, très différente entre SELARL ou SELAS peut grandement orienter votre choix
La fiscalité des dividendes est un point important qui oriente souvent le choix des professionnels entre SELARL ou SELAS

Pour en savoir davantage sur la fiscalité des dividendes, et les modalités de calcul détaillées, vous pouvez consulter cet article proposé par le service public.

La libération des apports en capital

Une différence concerne également la « libération » des apports en numéraire. En langage courant, cela désigne la somme d’argent composant le capital social que vous devez immédiatement verser sur le compte de la société lors de sa création.

Dans le cas d’une SELARL, il est possible de ne verser que 20% du capital prévu tout de suite, contre 50% pour une SELAS. Dans les deux cas, le reste du capital doit être versé dans les 5 ans.

Si vous prévoyez de créer une SEL avec un capital important, ayez donc en tête que vous devrez avoir une trésorerie disponible plus conséquente en SELAS, sachant que l’instruction du dossier peut prendre plusieurs mois.

Les droits d’enregistrement à la cession

Le jour où viendra la cession ou la transmission des parts que vous détenez dans votre SEL, sachez que la fiscalité afférente au transfert n’est pas la même entre SELARL ou SELAS.

Sur ce point de vue, la SELAS est mieux lotie : les droit d’enregistrement s’élèvent à 0,1% du prix de cession. En SELARL, ces droits d’enregistrement montent à 3%. Cette différence peut être significative si votre société possède des actifs de valeur importante (immobilier, matériel, clientèle). Sachez toutefois que c’est l’acquéreur des parts qui devra s’acquitter de cette taxe. 

Basculer d’un statut de SELARL à SELAS, et inversement

Il est possible de basculer d’un statut de SELARL à SELAS, et inversement. Ce changement de forme sociale entraîne de nombreuses conséquences fiscales et sociales et nécessite un accompagnement spécialisé pour être mis en oeuvre.

Quid de la SELAFA et la SELCA ?

Les deux formes juridiques que sont la SELAFA (SEL à forme anonyme) et la SELCA (SEL en commandite par actions) sont très spécifiques et finalement extrêmement peu répandues. Par souci de simplification, je n’aborde pas le détail de ces sociétés.

SELARL ou SELAS : Ce qu’il faut retenir

Choix forme juridique selarl selas
Tableau comparatifSELARLSELAS
Nombre d'associésMinimum 1, Maximum 100Minimum 1, pas de maximum
Rédaction des statutsPlus encadrée, mais personnalisation possible tout de mêmePlus grande liberté sur le plan juridique: organisation de la gouvernance, modalités des opérations de cession d'actions, organisation de droits spécifiques à certains associés
Libération des apports en capitalMinimum 20% à la créationMinimum 50% à la création
GouvernanceUn ou plusieurs Gérants avec les mêmes pouvoirs
Simple si peu d'associés
Président + autres organes qui peuvent être définis statutairement
Mieux adapté si pluralité d'associés avec des rôles différents
Statut social du professionnelTravailleur non-salarié (TNS) dans tous les cas

+ affiliation au régime général en complément si mandat de gérant minoritaire/égalitaire rémunéré
Travailleur non-salarié (TNS) dans tous les cas

+ affiliation au régime général en complément si mandat social de président rémunéré. Cotisations sociales plus élevées sur la rémunération du mandat social de président uniquement
Fiscalité des dividendesIR 12,8% + Cotisations sociales si Dividendes > 10% des apports actionnaire

Flat tax 30% si Dividendes < 10% des apports actionnaire
Flat tax 30%
Droits d'enregistrement à la cession3% du prix de cession payé par l'acquéreur0,1% du prix de cession payé par l'acquéreur
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Thibaut Sadones

Fondateur d'Optiliberal, expert dans l'accompagnement des professions libérales sur des thématiques fiscales et patrimoniales
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